Je suis arrivée en France en 2005. Il a fallu que je quitte mon pays, la Roumanie, pour des raisons personnelles. Je ne parlais pas du tout un mot de français. J'ai commencé avec des petits boulots : nounou, femme de ménage…
À la tête de Rectif 46, Petra incarne une réussite patiente et passionnée, déterminée à faire vivre des savoir-faire et à développer son entreprise. Son parcours de vie et de cheffe d’entreprise sont inspirants. Ils se résument simplement : “Ose et crois en toi.”
À la tête de Rectif 46, Petra incarne une réussite patiente et passionnée, déterminée à faire vivre des savoir-faire et à développer son entreprise. Son parcours de vie et de cheffe d’entreprise sont inspirants. Ils se résument simplement : “Ose et crois en toi.”
• Petra a 18 ans lorsqu’elle quitte la Roumanie. Elle ne parle pas un mot de français.
• Elle commence comme femme de ménage avant de découvrir l’industrie.
• Elle tombe amoureuse de la rigueur industrielle et n’a plus jamais quitté cet univers.
• À 30 ans, elle reprend ses études pour mieux évoluer dans un monde technique exigeant.
• En 2023, elle reprend Rectif 46, une entreprise de rectification de précision.
• Son état d’esprit: “Prouver qu’on est légitime à faire ce qu’on aime, même dans un métier d’hommes.”
Je suis arrivée en France en 2005. Il a fallu que je quitte mon pays, la Roumanie, pour des raisons personnelles. Je ne parlais pas du tout un mot de français. J'ai commencé avec des petits boulots : nounou, femme de ménage…
J'ai eu l’opportunité de venir travailler dans le Lot, chez Pivaudran. Ils font les bouchons et flacons pour les parfums de Dior ou Chanel. C’est là que je me suis découvert une passion pour l’industrie. Je me suis dit “Mais c’est pour moi, en fait”(sourire).
La rigueur et le fait que les journées ne se ressemblent pas. Le fait aussi qu'il y a beaucoup de réflexions à avoir. Il faut réfléchir à longueur de journée pour optimiser notre travail, la ligne, la chaîne…
L’ancien gérant de Rectif 46 cherchait à céder son entreprise. Il ne voulait pas la laisser à n’importe qui. Il trouvait que j’avais le bon profil. Il a vu en moi quelqu'un que je ne voyais pas forcément. Il me faisait confiance. Il voulait que les emplois soient maintenus et que le savoir-faire soit sauvegardé sur le territoire. On a parlé pendant un an et j’ai sauté le pas à la fin de l’année 2023. Et pour être honnête, c'était vraiment fait pour moi. Ça me correspond bien.
Oui, quand j’ai repris, nous étions 7. Aujourd’hui, nous sommes 11. Mais c’est compliqué de recruter. C’est un métier très spécifique, qui ne s’apprend plus à l’école. Il s’apprend sur les machines.
Nous travaillons des pièces neuves, déjà usinées, pour leur donner des géométries parfaites en fonction des exigences des clients. Nous intervenons aussi sur des pièces usées, à qui nous offrons une seconde vie. C’est utile à tous les secteurs : l’aéronautique, le sport auto, le médical, le naval, le ferroviaire…
"J'ai commencé avec des petits boulots : nounou, femme de ménage… "
"C’est un métier très spécifique, [..]. Il s’apprend sur les machines."
Oui. C’est un projet qui me tient à cœur : ouvrir un centre de formation pour former de futurs rectifieurs. Je tiens à faire perdurer l’entreprise et le savoir-faire. Dans l’atelier, j'ai des techniciens qui ont une ancienneté de 25 ans. Pourtant, ils me disent : “J'apprends tous les jours.”
Oui. Nous subissons encore les stéréotypes où les garçons font de la mécanique et les filles de la couture. Alors que pas du tout. Les femmes savent très bien faire ça. Mais pour l’instant, je n’ai pas reçu beaucoup de CV de femmes.
C’est une question qu’il ne faut pas se poser. On est légitime, chacun est légitime à faire ce qu'il a envie de faire et qu'il aime faire. Moi, j’ai été extrêmement bien accueillie. J’ai reçu de nombreux encouragements de la part de mes confrères et mon équipe est derrière moi.
Je connaissais les bases mais j’ai dit aux salariés : “Je me vois mal vous donner des ordres si je ne peux pas les appliquer. Je vous demande donc de m’apprendre.” Pendant plus d'un an, et même encore aujourd'hui, je suis avec eux dans les ateliers, je remonte les manches et ils m'expliquent comment ils font. Quand ils partent et que je reste seule dans l'atelier, ils me laissent des petits schémas avec des dessins. J'ai des petits mots au-dessus des machines, “N'oubliez pas de faire ça”, “N'oubliez pas de faire comme ça”. Aujourd’hui, grâce à eux, je sais rectifier.
Je fais tout pour que tout se passe bien. Nous avons aménagé des horaires de travail pour que les équipes puissent avoir deux jours et demi de week-end. Nous finissons le vendredi à midi. Pour les personnes qui viennent d'un peu plus loin, j’ai mis en place la semaine de quatre jours. On est une petite entreprise et je pense qu'il faut travailler pour le bien-être de tout le monde.
Moi, je veux bien recevoir tous ces prix mais il faut qu’il y ait un impact. Je veux montrer qu’une femme peut reprendre une entreprise dans un milieu où habituellement ce sont des hommes. Je veux que cela ait un impact auprès des femmes et les encourage à oser. Ce n’est pas parce qu'on est des femmes qu'on n'a pas le droit d’oser et de réussir. Se poser trop de questions, c'est se mettre des freins. Il faut oser et s’entourer de personnes positives.
"Je tiens à faire perdurer l’entreprise et le savoir-faire."
"Je pense qu'il faut travailler pour le bien-être de tout le monde."
Crois en toi, tu vas y arriver (sourire).